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Il s’agit du pire naufrage dans la Manche depuis le début de l’année 2024. Selon le dernier bilan provisoire, douze personnes sont mortes, et plusieurs autres se sont blessées, mardi 3 septembre, dans le naufrage d’une embarcation de migrants près de Boulogne-sur-Mer, a fait savoir le ministre de l’intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin. « Tous les services de l’Etat sont mobilisés pour retrouver les disparus et prendre en charge les victimes », a-t-il écrit sur X.
De Boulogne-sur-Mer, Gérald Darmanin a appelé en début de soirée à « rétablir une relation migratoire classique avec notre ami et voisin » britannique, par « un traité migratoire entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne », demandé par la France depuis deux ans. Le premier ministre britannique, Keir Starmer, élu en juillet, s’était engagé peu après à « donner un nouvel élan » à la relation entre Londres et Paris.
Plus de 60 personnes étaient entassées à bord du bateau qui a fait naufrage en fin de matinée, a détaillé le ministre, ajoutant que 51 avaient été « sauvées », bien que deux se trouvent « en urgence absolue », et que douze étaient mortes, parmi lesquelles « une dizaine de femmes », y compris des mineures. « Moins de huit » passagers du canot avaient des gilets de sauvetage, fournis par les passeurs, a-t-il poursuivi.
Selon le procureur de Boulogne-sur-Mer, Guirec Le Bras, les naufragés sont « essentiellement Erythréens ». Une enquête a été ouverte pour « aide à l’entrée et au séjour irréguliers en bande organisée », et « homicide involontaire aggravé », mais il n’y a pas eu d’interpellation à ce stade, a-t-il ajouté.
Gérald Darmanin a évoqué « la détermination de notre pays d’accueillir les personnes qui sont sur notre sol et qui demandent l’asile », tout en assurant que « moins de 5 % d’entre elles demandent l’asile en France ; ce qu’[elles] veulent, c’est partir ». Estimant que les victimes sont « sans doute des personnes de la Corne de l’Afrique », le ministre de l’intérieur démissionnaire a ajouté que ceux qui tentent la traversée de la Manche le font pour « rejoindre une famille, pour y travailler parfois dans des conditions qui ne sont pas acceptables en France ».
Ces gens « veulent partir en Grande-Bretagne, et ce ne sont pas les dizaines de millions d’euros que nous négocions chaque année avec nos amis britanniques et qui ne payent qu’un tiers de ce que nous dépensons, nous », qui feront cesser les départs clandestins, a-t-il poursuivi.
Le bateau a coulé à environ 5 kilomètres au large du cap Gris-Nez. Un navire affrété par l’Etat, le Minck, a repéré l’embarcation en difficulté – qui comptait plus de soixante personnes à son bord –, se portant à son secours dès que celle-ci s’est disloquée, a expliqué le lieutenant de vaisseau Etienne Baggio à l’Agence France-Presse (AFP).
Outre le Minck, des hélicoptères des pompiers et de la marine, deux bateaux de pêcheurs et des navires militaires sont mobilisés pour l’opération de recherches, toujours en cours. De nombreux véhicules du SAMU et des pompiers sont déployés dans le port de la ville, où un poste médical avancé a été mis en place pour la prise en charge des victimes, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Avec le naufrage de mardi, au moins 37 personnes ont perdu la vie dans ces traversées depuis janvier 2024, ce qui en fait l’année la plus meurtrière depuis le début du phénomène des bateaux de fortune sur la Manche.
La ministre de l’intérieur britannique, Yvette Cooper, a qualifié, mardi, la mort de ces migrants « d’affreuse et profondément tragique ». « Les gangs à l’origine de ce trafic effroyable et sans scrupule de vies humaines entassent de plus en plus de personnes sur des canots pneumatiques de moins en moins en état de naviguer, et les envoient dans la Manche même par très mauvais temps », a-t-elle déclaré dans un communiqué.
Selon les autorités britanniques, les traversées illégales de la Manche vers le Royaume-Uni ont atteint un nombre sans précédent au premier semestre 2024, recensant depuis janvier 21 615 migrants arrivés sur leur sol par ce moyen. En tout, près de 136 000 personnes ont traversé la Manche au départ de la France sur ces radeaux de fortunes, depuis que le Royaume-Uni a commencé à comptabiliser ces arrivées en 2018. Le phénomène s’est développé en réponse au verrouillage croissant du tunnel sous la Manche et du port de Calais pour enrayer les intrusions de migrants.
Les drames se sont notamment succédé depuis le début de l’été, alors que les traversées sur des bateaux de fortune ont été plus nombreuses, et les embarcations, toujours plus chargées. Entre le 12 et le 19 juillet, six migrants sont morts dans trois naufrages distincts, les embarcations étant surchargées : quatre le 12 juillet, une femme érythréenne le 17 juillet, puis un homme le 19. A la fin de juillet, une jeune femme de 21 ans est morte écrasée sous le poids d’autres passagers d’un canot surchargé, et deux autres migrants sont morts dans un naufrage le 11 août, au large de Calais.
Charlotte Kwantes, de l’association d’aide aux migrants Utopia 56, a dénoncé auprès de l’AFP une politique de « répression policière » sur le littoral français « complètement inefficace (…), qui conduit à des incidents et à des drames (…) à répétition », ajoutant : « Cela fait deux mois et demi qu’il y a quasiment toutes les semaines des morts dans la Manche. » Le directeur général de l’association britannique Refugee Council, Enver Solomon, a appelé à « améliorer les accès légaux pour ceux qui cherchent à se mettre en sécurité ».
Arrivé au pouvoir au début de juillet, Keir Starmer, a annoncé vouloir accélérer le traitement des dossiers de demandeurs d’asile tout en durcissant la lutte contre les passeurs, afin de « renforcer » les frontières.
Le Monde avec AFP
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